Nous ne devenons pas tous parents et le bonheur n’en est pas pour autant oublié. Il est des vies qui se savourent au contact d’autres découvertes, d’autres souffles, d’autres inventions.
Que nous choisissions ou non de devenir parents, il sera toujours question pour un être humain d’éprouver sa vie au travers de liens qu’il tissera avec ses autres semblables.
S’il y a deux termes qui semblent étroitement associés entre eux, ce sont bien ceux de parent et de famille. Fonder une famille reste la motivation première qui guide le désir toujours inabouti d’enfant.
Si la famille a connu ces dernières décennies de grands bouleversements quant à sa pérennisation, l’importance de la famille ne s’en trouve pas pour autant altérée.
Qu’elle soit le lieu de nos vœux les plus chers ou de nos plaintes les plus virulentes, la famille conserve son caractère sacré tant il est vrai que convergent vers elle la panoplie de nos émotions les plus instinctives et les plus humaines.
A l’heure où sévit l’injonction de la ressemblance et que règne la culture du modèle et du bien-pensant, il semble que la différence soit paradoxalement notre seul point de ralliement.
Il n’y a pas deux parents qui soient identiques et c’est bien dans le creux de cette différence intrinsèque que viendra se loger la subjectivité de l’enfant.
Puisqu’un exemple n’est bon que s’il est particulier, cultiver sa singularité deviendra le seul impératif à suivre.
Lorsque Sigmund Freud qualifie d’impossible le métier de parent, ce n’est jamais que pour insister sur l’intrication simultanée entre la tâche éducative et la loi du cœur attenante à chaque parent.
Guider et élever ses enfants feront des évidences et des principes éducatifs de futiles appuis pour l’apprenti parent en charge de prendre soin de ce petit être qui l’affecte tant.
L’amour devra se prolonger au-delà de ses frontières en permettant à un enfant de s’ouvrir au monde et d’y prendre sa place.
L’amour devra se fâcher sans se retirer. L’amour se parlera en choisissant des mots qui portent la croissance. Des mots qui résonnent. Des mots qui invitent au partage. Des mots qui punissent. Des mots qui grondent. Des mots qui se respectent.
Puisqu’accompagner un enfant, c’est avant toute chose pouvoir l’élever au rang de la parole et promouvoir sa pensée.
L’amour accompagne l’humanité.
En donnant la vie à un enfant, le parent lui transmet son humanité, ses valeurs et son sens particulier dans un décor mu par l’extraordinaire.
Une humanité adoucie par la sonorité des mots.
Une humanité empreinte de ses forces mais aussi de sa fragilité.
Puisqu’il n’y aura jamais de meilleur parent pour cet enfant que celui-là, la fragilité dévoilera son potentiel à s’inventer dans des trouvailles inédites et inattendues.
Si l’amour fait appartenir, cette même appartenance signera les conditions de sa liberté.
Si l’amour et la parole nourrissent les relations humaines, la séparation donne à l’amour sa consistance et sans elle, l’amour n’aurait jamais rien gagné.
L’amour se sépare sans prendre fin.
L’amour commence là où l’horizon se dessine.
Patricia Lembourg
Psychologue – psychothérapeute